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Le mauvais temps à Foncine

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Micheline a retrouvé dans son grenier quelques lettres datées de 1950. Voici quatre extraits de ces lettres qui racontent ce qu'était la neige il y a 50 ans.


19 novembre 1950

Voilà déjà bien des jours qu'on ne peut pas aller dehors, à part hier. Il y a eu des inondations dimanche passé. Chez Joseph Liboz se sont trouvés isolés par l'eau. Elle est entrée dans le jardin à Reygrobelet et dans le leur pour passer entre les deux maisons. Tu vois l'atelier au Joseph ? S'ils n'avaient pas eu le pont suspendu qui mène à leur écurie, ils n'auraient pas pu sortir. Toute la matinée le Joseph a travaillé pour arriver à lever sa deuxième vanne et à dégager les branches que l'eau avait amenées contre sa passerelle et qui formaient barrage. Chez nous je suis arrivé à enlever à temps la dynamo. les arrivoirs sont défoncés entre les deux vannes. le premier est cassé. Deux jours sans lumière.

Une scierie près de Fort du Plasne a été complètement mise hors d'usage. L'eau est arrivée par le chantier emportant les plots à travers l'usine, ainsi que l'outillage. Seul le châssis est resté à peu près en place. Dans une autre, 25 mètres cube de bois de sciage sont partis. le barrage de Malvaux est en partie enlevé.

Les vaches ne sont pas sorties depuis le 25 octobre; d'abord très froid avec à peine de neige, ensuite pluie et neige vers le 5 novembre, et toujours pareil. J'avais encore quelques sapins à couper. rien de fait.

9 mars 1951

Comme tu le penses, nous avons beaucoup de neige : 40 à 80 centimètres dans les coteaux, un mètre à l'ombre, un mètre chez l'Alphonse, un mètre 25 et plus dans le Mont Noir.

Le Joseph de la Norbière est obligé de sortir par la fenêtre en bout de sa maison, sa porte étant complètement bouchée. Il n'est pas question pour personne, d'aller au bois au Mont Noir. Cependant Paul va avec Achille couper sur Carrez au Teppois. C'est au soleil, ça va à peu près.

Pas mal de scieries sont en chômage par manque de bois.

Les vaches ont bientôt toutes fait le veau, mais elles ont peu de lait. Je n'ai rien pu vendre; le commerce ne marche pas. Aussi l'écurie est pleine et François Blondeau ne veut plus prendre nos génisses.

13 mars 1951

Ici c'est encore l'hiver; par période une neige pourrie et mouillée; une autre, de la neige gelée le matin et radou à midi. Le long du bois derrière chez nous il y a encore 60 cm de neige. Le Joseph de la Norbière ne peut plus sortir par sa porte. Il sort par la fenêtre du bout de la maison devant laquelle la neige ne tombe pas du toit.

Le Flavien Blondeau ne peut prendre nos génisses car le propriétaire de la pâture demande trop cher. Nous sommes allés, le papa et moi, chez le Joseph il y a deux mois. On ne voyait que 40 cm de sa porte de grange. Il a fait des escaliers dans la neige et il a été obligé de peller devant ses fenêtres pour voir clair.

13 fevrier 1952

François Blondeau n'a pas eu de chance. Le 13 janvier au soir, il était allé descendre de la paille. Survient une panne de lumière causée par la tempête qui faisait rage. Peut-être une minute d'obscurité. Il ne se rend pas compte où il est et marche dans le vide, tombe dans la grange, se casse le pied dans son sabot, le haut du fémur et fêlure du bassin.

Transporté de suite à la clinique où il reste 12 jours. Maintenant il est chez lui, mais au lit, sans doute encore pour deux mois et très probablement qu'il restera boiteux.

Au bois, notre lot était de 360 sapins. La moitié est faite. Il y a beaucoup de noeuds et c'est dur. Nous avons 65 francs la solive, ce qui fait 455 francs le mètre cube. Nous n'avons pas pu y retourner depuis le 15 janvier. Le 4 février je suis allé chercher mes outils en skis. Un mètre de neige vers chez le grand Joseph.

Lundi 11 au soir, il a plu jusqu'à hier midi. Après, neige jusqu'à la nuit puis forte gelée la nuit passée, -18°. Les Ponts et Chaussées ne sont pas arrivés à déblayer Saint-Laurent et les environs avec quatre tracteurs en marche. Ils sont venus amener le courrier hier soir tard. La route est une cheneau qui a laissé passer juste une auto. Le car de Champagnole es bloqué aux Planches.

C'est encore un hiver sont on se souviendra. Si tu avais vu samedi, dimanche et lundi, chacun était sur son toit à jeter la neige en bas. A Foncine pas de catastrophes à signaler à part quelques pièces de charpente qui ont cédé et la remise au Zi qui s'est écrasée. A la Chaux des Crotenay une toiture complète s'est effondrée. Comme température nous avons eu -18 à -20 pendant quatre jours.

Date inconnue

André Guy et Roussey viennent de former une société. Gérard leur a consenti une location-vente. Ils travaillent à leur compte en sciant à façon, car les capitaux leur manquent pour acheter eux-mêmes du bois ... Voici la deuxième semaine qu'ils ne travaillent pas car il y a trop de neige à peller. Avant, leur usine marchait treize heures par jour avec deux équipes d'ouvriers.

(Les deux scieries du village devaient fermer en même temps. André Guy et Jean Roussey avaient décidé d'en maintenir une en activité. André Guy aurait préféré acheter celle du haut. Roussey avait choisi celle du bas qu'il connaissait mieux, d'autant qu'il était apparenté à Gérard).

Et plus gai

Date inconnue

"Gai mon village" a déjà donné quelques séances. La dernière était très bien réussie. Un beau drame : "Fatima", un épisode de la guerre du Rif au Maroc en 25. Parmi ceux qui jouaient :

le 18 février 1951, représentation de "Fatima", par "Gai mon village"

 

Micheline : Fatima, petite arable blessée à mort.
Michelle Muller : esclave arable de la fille du Caïd.
Gilberte Fumey : lieutenant de spahis qui sauve sa fiancée.
Paul Pagnier : soldat arable, gardien du lieutenant prisonnier.
Henri Michaud : le Caïd
Et Jeannine Jeunet, Odette Cat, Régine Fumey, André Michaud, Simone Meulnotte, Raymond Blondeau

 

Ils ont eu un beau succès.

le 28 janvier 1951, représentation des "Paysans"

Et une autre lettre :

"Gai mon village" a fait théâtre dimanche 10 avec "Le Chemineau", pièce en vers, cinq actes, de Jean Richepin, et une petite comédie "La noce à Canibeau, boucher en gros". Le roi des veaux était bien choisi, c'était Dubief. Dimanche 12, grand concours de ski à Foncine, coupe Cottet. Les couleurs foncinières ne brillèrent pas, car pas d'équipe digne de ce nom à mettre en ligne. Les sauteurs néant. A Foncine le Haut, le challenge Micro Rubis a été gagné le dimanche 23 par l'équipe du Locle (Suisse). Leur remonte-pente fonctionneà une allure de limace.


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