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L'inquisition meurtrière dans le Haut-Jura

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extraitdu "Progrès" du 1er septembre 2007

A la fin du XVIe siècle, la répression menée contre les sorcières atteint son appogée. En tout, une quarantaine de procès se dérouleront. La plupart du fait de l'acharnement du juge Boguet.

La chasse aux sorcières s'installe véritablement dans la Haut-Jura à la fin du XVIe siècle. Une quarantaine de procès se dérouleront sur une période d'environ soixante ans. Ce nombre peut paraître léger face aux répressions menées par Nicolas Rémy ou Pierre de Lancre. Pourtant la violence et la rapidité avec lesquelles débute la chasse aux sorcières dans le Haut Jura, son caractère géographiquement restreint et la célébrité du juge Boguet en font un épisode marquant.

A cette époque se cristallisent dans la région toutes les tensions et les angoisses d'une fin de siècle. La peste sévit à l'automne 1607 et le passage fréquent de troupes armées (guerres, épidémies et famines), dès le début du XVIIe siècle, contribuent à créer un climat d'insécurité au sein des communautés villageoises haut jurassiennes.

Le Haut Jura se distingue du reste de l'Europe par un fort pourcentage d'hommes parmi les accusés.

A cette ambiance, doctrines et croyances relatives à l'extinction de l'homme de l'univers, s'ajoutent les "dangers" de l'hérésie calviniste toute proche. La terre de Saint-Claude est isolée, proche de la Suisse protestante.

Un rempart contre l'hérésie genevoise

La mainmorte oblige les paysans à pratiquer la consanguinité. Le "mauvais oeil" est partout. Les sorciers et leur maître, le diable, sont à l'origine des mauvaises récoltes, des maladies, de la perte du bétail. La Franche-Comté, sous la conduite de Philippe II puis d'Isabelle de Castille à partir de 1598, reste très fidèle à l'orthodoxie catholique et fait du Haut Jura un rempart géographique contre l'hérésie genevoise.

Isabelle de Castille

A partir de 1575, des enquêtes sont ouvertes et très rapidement, la chasse aux hérétiques se transforme en chasse aux sorcières. La justice écclésiastique, lors de ces enquêtes, va se rendre compte que les ouailles haut jurassiennes sont en proie aux superstitions les plus folles et que le sorcier est au sein du village plus sollicité que le curé.

La détermination du juge Boguet

En 1596, tout est donc réuni pour entamer une chasse aux sorcières de grande envergure. A la détermination de Boguet et des autorités s'ajoute le refus par les communautés villageoises de la fatalité qui les frappe régulièrement. La première victime, Françoise Secretan, une mendiante de Coyrière avoue sous la torture et dénonce douze personnes dont sept sont brûlées sur les étapes (l'actuel cimetière) le 25 août 1598. Le Haut Jura se distingue du reste de l'Europe par un fort pourcentage d'hommes parmi les accusés. Quant à la sorcière, elle est jeune, bien intégrée, souvent mariée avec des enfants. De jeunes enfants deviennent accusateurs.

Pierre Vuillermoz de Coiserette, âgé de 12 ans, accuse son père Guillaume, qui décédera dans sa cellule suite aux tortures. Thévenin Pinard est accusé alors qu'il a 14 ans. La peur du loup (Boguet raconte que pendant l'hiver 1597 des enfants de Longchaumois sont dévorés par des sorciers transformés en loups) pousse les villageois à croire aux loups garous (lycanthropie). Toute une famille sera massacrée ou brûlée en 1599 quand l'un d'eux, Pierre Gandillon, est accusé de lycanthropie.

Le juge Boguet

Henri Boguet ne doit pas sa célébrité qu'aux bûchers qu'il a dressés à Saint-Claude. Il est aussi ce que l'histoire en a fait. Célèbre pour son "Discours exécrable des sorciers" publié en 1606, le Grand juge de la terre de Saint-Claude de 1598 à 1616, fanatique zélé, voyait le diable partout. Il naît à Pierrecourt en Haute-Saône au milieu du XVIe siècle. Peu de choses ont filtré sur son milieu d'origine. Sans doute n'est-il pas issu des classes les plus basses de la société. Dans son enfance, il fut au contact des procès de sorcellerie qui se déroulèrent dans la seconde moitié du XVIe siècle. Il se vanta d'avoir envoyé au bûcher des centaines de sorciers. On a beaucoup exagéré son rôle. Longtemps, la rumeur a circulé le faisant bourreau de six cents victimes. En réalité, les minutes des procès conservés aux archives font état de 25 à 26 malheureuses victimes entre 1598 et 1643.


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