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les Passevolants

Prise de Besançon. Charles Le Brun, la seconde conquète de la Franche-Comté


Tous les bourgeois connaissent les inconvénients du logement des troupes chez l'habitant, ou à la charge des Conseils de ville. Les Dolois avaient demandé à Louis XIV, dans un article de la capitulation, la construction de casernes pour y remédier, sans d'ailleurs l'obtenir. Aux villes où elle s'arrêtait, la troupe devait recevoir l'Etape, selon le nombre d'hommes dont elle était composée, et le fourrage selon le nombre de chevaux.
A cette occasion, il est intéressant de constater dans les règlements de l'époque, qu'un cheval de colonel mange douze fois plus de fourrage que celui d'un simple soldat. Quelle curieuse chose ! Buffon lui-même n'en parle pas.

Le soldat, maraudeur, voleur de poules, était craint à la campagne, en ville la tactique différait. C'est ce que nous révèle une ordonnance du roi du 14 juin 1702.


« De par le Roy,
Sa majesté étant avertie que des Officiers de ses Troupes font passer aux Revues des Maires, Consuls, Echevins ou Syndics des lieux où ils ont à loger suivant ses routes, tous les vagabonds et mendiants qu'ils peuvent trouver dans les environs desdits lieux en leur donnant peu de chose afin de recevoir l'Etape pour plus d'hommes qu'ils n'ont effectivement ; et qu'il arrive aussi souvent que des Officiers de Cavalerie et de Dragons font monter sur leurs chevaux des cavaliers et des dragons qui sont à pied, pour les faire passer à cheval aux Revues qui leur sont faites dans les lieux d'Etape, lesdits Officiers s'y présentant à pied pour profiter du fourrage, qui par ce moyen leur est fourny deux fois pour un même cheval ; et voulant empêcher la continuation de ces abus : Sa Majesté a ordonné et ordonne, que tout homme tel qu'il puisse être, qui se trouvera dans une Compagnie ou Recrue, sans y être enrôlé, aura comme Passevolant le nez coupé sur le champ, sans rémission par l'Exécuteur de la haute Justice.
Ordonne et enjoint Sa Majesté aux Maires … d'en informer le Secrétaire d'Etat ayant le département de la Guerre, pour en rendre compte à Sa Majesté, et recevoir les ordres, pour faire casser les Officiers qui auront présenté aux dites Revues lesdits Passevolants. Ordonne qu'aucun Officier ne pourra être passé en revues par les Maires s'il n'est à cheval et monté comme il convient . Entendant aussi Sa Majesté, que s'il arrive que des Officiers usent de quelques violences, menaces ou injures envers lesdits Maires pour les obliger à les passer en Revue étant à pied, ils en dresseront leurs procès verbaux pour les envoyer au Secrétaire d'Etat de la Guerre. Mande et ordonne … de tenir la main à l'exécution de la présente, qui sera publiée dans tous les lieux d'Etape à ce qu'aucun n'en prétende cause d'ignorance.
Fait à Versailles le quatorze juin mil septcens-deux. Signé Louis.
Vu … André de Haroüys, Chevalier au Comté de Bourgogne
 ».

Aujourd'hui, les militaires dans les villes de garnison en font généralement la prospérité, et accessoirement les nuits blanches. Dans les siècles précédents, les troupes de passage ne procuraient que des inconvénients à l'Etape. Le manque de discipline du simple troupier n'était pas seul en cause, les officiers étaient les grands coupables, nous l'avons vu. Responsables, nobles et vertueux, les héros de nos lectures ne sont pas ceux des procès-verbaux.


Ainsi il est question de troubles  que procurent en la ville de Lons, les 5, 7 et 19 juin 1748, quelques têtes folles et empanachées des compagnies de cavalerie de monsieur de Marbeuf.
« Les officiers, accompagnés de quelques  cavaliers, coururent les rues pendant la nuit, frappèrent aux portes à grands coups de pierre, et entreprirent d'entrer chez plusieurs membres du Magistrat, cassant les vitres, etc … Ils portaient des couvertures pour faire sauter les passants qu'ils pouvaient rencontrer sans distinction de sexe ni d'âge. Ils firent ainsi sauter l'apothicaire Goirand, sexagénaire, et le laissèrent tomber dans la boue. Même traitement à plusieurs autres, notamment à la femme Gindre. Ils distribuèrent aussi des coups de pieds à plusieurs personnes. Ne pouvant enfoncer la porte de N. Fougeroux, l'un des trois échevins, ils accablèrent ce magistrat de grossières injures. Le conseil municipal porta plainte, notamment contre MM. Méaupou, de Champagny et de Noë … » (Rousset, Dictionnaire des communes, 1855).
Peut-être que ces nobles messieurs eurent la bonne grâce de se faire tuer lors de la guerre de Sept ans, pour entrer dans la vraie légende et les bons livres d'Histoire.


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