http://foncinelebas.free.fr


Le Conte de Vise Lou Bu

 

Extrait du manuscrit de l'Abbé Léon BOURGEOIS "Essai sur l'histoire de Chapelle des Bois"

PROLOGUE

Le célèbre conte de Vise-Lou-bu, a eu un assez grand nombre d'éditions plus ou moins exactes et écrites avec une orthographe qui dans toutes, laissait beaucoup à désirer; les moins mauvaises sont celle de Max BUCHON et celle MOREAUX, imprimée à Chalon-sur Saône en 1864. Georges BLONDEAU, substitut du Procureur de la République à Beaume-les-dames et dont les ancêtres étaient de Chatelblanc, de concert avec Monsieur Bernard PROST, archiviste travaillant dit-on à une nouvelle édition du conte de Vise-lou-bu, laquelle serait enrichie de charmants dessins de Job, célèbre caricaturiste. Celle que je vais donner ici me parait être la plus authentique. En 1835, mon père la reproduisait sur un manuscrit qui datait de 1815; sans doute j'ai souvent changé l'orthographe que j'ai approprié aux règles grammaticales données plus haut, mais le texte sauf quelques expressions qui me paraissaient par trop grossières, est exactement le même.

Ce conte, di la tradition, fut composé, une après-midi de l'an 1750 dans la maison de Maître PERRENET, notaire aux Planches; il est certain que Monsieur l'Abbé BLONDEAU, curé de la Chaux-des-Crotenay, en fut le principal auteur. (1)

Malgré toutes les recherches que j'ai faite, soit à Chapelle-des-Bois, soit à Morbier; je n'ai rien trouvé sur la réalité des personnages de ce conte; ce qui laisse à supposer que quelques uns d'entre eux existant encore à l'époque de la composition de ce conte, on n'a pas osé reproduire exactement les prénoms, et on a désigné sous le nom vague de Vise-Lou-Bu, le principal héros du roman. Ce qui est certain, c'est que ce personnage a existé, puisque ci-contre, on a reproduit la photographie des ruines de son chalet; ce qui est moins certain, c'est qu'il était un PAGNIER-BEZET des Prés-Hauts. Mon père m'a dit plusieurs fois, que délimitant des terrains aux Prés-Hauts, il avait eu l'occasion d'avoir entre les mains l'acte de partage des biens de Vise-Lou-Bu avec ses oncles. Il croit se rappeler que cet acte, qui se trouvait chez un nommé MARTIN (Pire à Gros) datait de 1718. Il aurait cru trouver aussi que dans les actes, "Claude-Joseph PAGNIER-BEZET, dit Vise-Lou-Bu, sera mort à Chapelle-des-Bois le 16 mai 1796". Or ce Claude-Joseph est un PAGNIER-BEGUET et mon PAGNIER-BEZET; il était l'oncle de Jean-Baptiste PAGNIER-BEGUET, ancien maire de Chapelle-des-Bois.

En parcourant les actes de naissances, je vois un Pierre-Joseph PAGNIER-BEZET, né le 16 août 1686, fils de Pierre et de BLONDEAU Antonia; ne serait-ce pas le Pierre-Joseph signalé dans le conte, c'est très probable. Il aurait épousé une femme étrangère, ce qui explique pourquoi il n'est pas signalé dans les actes de mariage, et serait mort à Chapelle-des-Bois le 27 janvier 1766, à 80 ans. Ce Pierre-Joseph a eu deux frères, Louis et Claude-Antoine; je suis très porté à croire que ce Claude-Antoine serait le véritable Vise-Lou-Bu; il est né le 2 avril 1693 et a épousé en 1723, Gabrielle BOURGEOIS-MOINE, fille de BOURGEOIS Gilbert l'aîné et est mort le 13 novembre 1779, âgé de 86 ans. Comme les partages eurent lieu en 1718 et qu'il se maria en 1723, c'est entre ces deux dates qu'il fait probablement fixer sa campagne et son séjour au régiment, lequel, il est à croire, ne fut que de quelques semaines, de deux ou trois mois tout au plus. Précisons davantage encore s'il se peut, à cette époque de sa vie de soldat; ce fut après 1719 qu'il s'engagea puisque vers cette époque éclata la fameuse banqueroute de Law, qui ruina le pays et que, dans le conte on y fait allusion, par cette expression devenue populaire : "Que Law te foute !". Dans le conte, il est aussi question d'Hanovre et de combats aux environs de Schelestadt, c'était une guerre contre les allemands; or en 1721, quelques escarmouches furent données entre les français et les troupes de l'empereur Charles VI, au sujet du duc de Lorraine, Stanislas Lecksinski ennuyé dans ses possessions par les riverains de la Germanie.

1)Max BUCHON se trompe évidemment lorsqu'il dit que le conte a du être composé vers 1750; car à cette époque, Monsieur l'Abbé BLONDEAU, son auteur, né le 26 septembre 1746 aurait eu à peine 4 ans; de plus, on a dû attendre la mort de ce personnage pour lancer ce récit dans le public; Vise-lou-bu étant décédé en 1779, le conte n'a guère été fait qu'en 1781, car c'est en 1780 que Monsieur BLONDEAU a été nommé curé de la Chaux, près des Planches où il ne tarda guère à connaître le notaire PERRENET.


 


RÉCIT

Vous voudriez savoir si j'ai servi le roi, et comment ! Oh ! pardié ! je vous le conterai.

Quand nous partageâmes avec mes oncles, ce fut nous deux, notre Pierre-Joseph, qui eûmes le chalet; de rien de temps, nous l'eûmes rebâti; j'allais chercher des fascines de feuilles, et notre Pierre-Joseph en faisait les murailles et le contre-feu que nous enduisions avec de la marne. On se meubla passablement bien; nous avions deux belles chaises à trois jambes et une autre faite d'une courbe toute d'une pièce; deux beaux troncs enjambés qui pouvaient servir quand nous avions compagnie. Nous avions quatre beaux rondeaux, un tout à fait neuf, un autre renforcé et rejablé tout naturellement; trois beaux présuriers, un pain de sel et la moitié d'un autre; cinq belles chèvres et un bouc, deux qui ont chevreau et les autres qui ne l'on pas encore fait; je ne sais pas même si elles avaient été saillies; cinq chevrotins qu'on salait, cinq peaux de caillet et la moitié d'une autre; trois petites formes; vingt et un sous qu'on nous devait et dix sept et demi que nous avions en bourse, et qu'on n'en devait pas un foutre à qui que ce soit, c'est à dire que nous étions des gens à notre aise d'abord.

J'allais en champs à mon ordinaire; en m'en revenant, j'en apportais quelques fagots de bois et je trouvais toujours mon écuelle remplie de ce qu'il y a de meilleur; de la crème, du bon lait, des brèches, du brêchon, en un mot de ce qu'on peut donner à des gens de meilleur; le siable si jamais gens furent mieux que nous n'étions; notre Pierre-Joseph faisait toutes les affaires; moi j'allais en champs à mon ordinaire. Mais la rage du diable ne monta t-elle pas à la tête de notre garçon, ne pensa t-il pas à se marier ? Ce qu'il fit; mais diable ! ne prit pas la plus bougre de mégère que le million des diables ait pu faire; la bougresse me préparait mon écuelle pour quand je m'en revenais de champs, mais jamais la chose ! n'y avait-il dedans que du petit-lait le plus clair d'abord; on aurait vu le diable sautiller au bas.

Je patientai jusqu'au six de mai, jour de foire de Chatel-Blanc; le matin je jetai les chèvres et le bouc et je leur dis : "Allez ! A la garde de Dieu ! " et j'allais à la foire de Chatel-Blanc.

Tout en arrivant, je vis deux beaux soldats qui avaient des tuniques blanches; il y avait sur les manches et devant des chiffons jaunes; c'était le Roz et l'Antoine de chez André de Foncine; l'Antoine était un des maîtres; il avait des sous-pieds de cuit cousus sur sa gargasse. Je me crampais vers lui, ils me demandèrent si je voulais m'engager; je leur dis : "Oui ! foutre d'abord !" Ils m'emmenèrent dans un cabaret et firent venir du vin et on buvait. Ils firent un écrit sur un papier et me demandèrent si je savais signer; je leur dis "Hola ! non, jamais je n'ai su ce que c'est d'écrire !". Ils le firent signer à celui-ci, à l'autre, et me firent faire une croix dans un rond et firent revenir du vin; qu'il y faisait bon ! Cent diables !

En voici un qui vint, qui apporta une lettre qui était adressée à l'Antoine chez André; il l'a lut, la donna à lire au Roz; elle disait qu'il fallait foutre le camp, et tout contents on partit de suite. Quand on fut chez le Roz, bon vin, bonne chère d'abord. De là nous allâmes chez l'Antoine de chez l'André; cent diables ! Quel train ! Il y avait une table toujours longue, couverte de ce qu'il y avait de meilleur. Qu'il y faisait bon ! Cent diables ! J'étais plein comme une andouille et je voyais bien que j'étais avec de bonnes gens. Ils ne se défiaient pas de moi; ils firent leurs deux sacoches et les appondirent l'une à l'autre et me les confièrent tout le long du chemin sur mon épaule. Ils me donnaient à porter leurs manteaux quand il ne pleuvait pas; hola ! ils avaient toute confiance en moi d'abord. On allait par beau temps, par mauvais temps, de nuit, de jour; on marchait toujours, mais buvait-on ?...

Quand nous fûmes allés bien du temps, nous arrivâmes dans une grand'diable de vallée; il y avait au bout un petit village; le diable ! si jamais gens virent le plus pauvre village; les toits n'étaient faits qu'avec de la toile. Nous entrâmes dans une de ces cabanes; il ne s'y trouva que des gens vêtus comme les nôtres. Ils embrassèrent le Roz et l'Antoine de chez André; il n'y eu pas un bougre qui m'ait dit : "Chien ! es-tu là ?" ils partirent dehors, je ne sais pas où ils allèrent. Je m'assis sur un paquet de paille; en voici un qui vint et qui m'apporta un morceau de chou sur du pain; je le pris et le mangeais, mais buvait qui pouvait. Il y avait dans un angle de la cabane un baquet, mais diable la chose ! n'y avait-il que de l'eau; ce n'était pas mon compte d'abord. Sur ça, j'allais me coucher à la garde de Dieu sur un tas de paille. Je n'entendis pas les autres quand ils sen revinrent.

Voilà que bien avant qu'il fit jour, on commença à faire un train de tous les diables; on entendait que tambouriner, trompeter, corner, siffler, chancrenailler; les uns sautaient à leurs selles, les autres à leurs brides, moi je les regardais. Je commençais à m'engargasser, en voici un qui m'apporta une gargasse et une tunique rousses, comme étaient celles des nôtres, je les pris et les fichais. Un autre m'apporta une veste blanche qui avait des chiffons sur les épaules, comme étaient celles des nôtres; je la pris et je l'endossais; un autre m'apporta un grand diable de couteau courbe dans une gaine; ils me le pendirent à une courroie de cuir sur le cul. Ils me suspendirent sur l'autre flanc un petit sachet et il y avait dedans huit enveloppes de papier pleine de poussière et longue comme cela. Un autre m'apporta de grandes diables de chausses de cuir dont les souliers étaient appondus au bout; il y avait derrière de petites roulettes qui servent à tarabuster les chevaux; je les pris et les mis. Un autre m'apporta un beau chapeau bordé, il y avait dessus une belle cocarde, je le coiffais. Un autre m'apporta un petit mauvais mousqueton, peu de chose, il n'était rien long, je le pris. Un autre m'amena un beau cheval tout sellé, bridé, deux beaux pistolets devant la selle; le cheval venu, aussitôt je sautais dessus. Je voulais partir de suite, les autres ne voulurent pas et me dirent que ce n'était pas encore à nous de partir. Il partait de ces mauvais soldats vêtus de blanc et qui n'ont point de chevaux, de cette merdaillerie, il en partait, vous dis-je, mais des quantités ! Quand je suis encore à savoir comment les femmes ont pu faire pour en autant faire, y en avait-il cent diables !.

A la fin nous partîmes, quand nous fumes au bas d'un coteau je dis à celui qui était vers moi : "Où va t-on ?" Il me dit : "On va se battre". Je lui dit "oh ! quand je ne suis pas en colère, je ne puis rien faire !" je baissais la tête. L'aube du jour commença à donner, je vis sur la route un beau fer de cheval; je dis en moi-même : Foutre ! un fer de cheval ne se trouve pas partout; je descendis de cheval et le ramassai; les nôtres se foutaient de moi; oh ! les bougres, jamais je n'ai fait la plus belle journée; je voulais le cacher, mais le diable ! l'on avait retourné les poches de ma tunique en dedans, jamais je ne pu les trouver. Je ne savais que faire de mon fer, je le cachai dans la bande de ma gargasse. Quand nous fûmes en haut du coteau ce ne fut pas fini, le diable s'il sen trouva de l'autre côté, des troupes de tous les diables, qui nous tiraient dessus; les nôtres venaient quatre à quatre, huit à huit, avançaient, meuglaient, trépignaient, je me pensai; quel diable fera-t'il ? toi qui n'a jamais rien eu à faire à eux ? Diriez-vous bien qu'il y en avait un de l'autre côté qui men voulait ? moi qui n'avait jamais vu le bougre; il me tire dessus, sa balle vint s'aplatir contre mon fer, j'étais crevé comme un bougre; la colère m'aveugle, je cherchais dans mon sachet; je pris une des enveloppes, mordis le bout, je la jetais dans mon fusil, foutis les autres après. Je ne fus pas traître d'abord; je lui criais : " Gare aux yeux ! et je tirais ! le diable si mon fusil repousse et m'échappa. Celui qui était vers moi me faisait signe de reculer; je lui dis : "si les gens de Chapelle des Bois n'ont jamais su ce que c'est que reculer"; prends seulement garde à mon fusil, il est encore capable de te faire du mal; il y a encore sept coups à partir". je tirais hors du fourreau mon grand couteau courbe et j'allais contre ces chancres d'Hanovre, ces bougres d'Autrichiens.

Je commençais à leur en foutre, et de revient et de reva ! diable si mon grand couteau faisait feu contre eux. Quand j'en eu bien foutu de côté et d'autre, je vis que les nôtres avaient tous foutu le camp sans m'appeler; je me dis en moi-même : diable ! tu ne peux pas faire la guerre tout seul. Je regardais mon cheval, une pierre en aurait eu pitié. Il était tout pointillé, tout lacéré, tout couvert de plaies, il saignait partout, il semblait la grande misère. Deux de ces diables d'Hanovre qui n'ont pas de chevaux, vinrent contre moi; l'un sauta à la bride de mon cheval, l'autre me présentait son fusil, me secouait et me disait que j'étais prisonnier. Je leur dis "que law te foute !" je foutis un coup de mon grand couteau courbe à celui qui était vers moi et l'envoyai à tous les diables; à l'autre je lui foutis un coup à main renversée et lui foutis la tête au diable quand je crois qu'elle roule encore.

Je me dirigeai d'où j'étais venu; je crevais de faim, mon ventre semblait une lanterne; j'avais les dents comme un râteau dont on se sert pour tourner les mottes. Je montai sur le haut d'un coteau, nos gens avaient changé d'endroit sans men parler. La nuit me prit. Je vis du feu à un endroit; je me dirigeai contre; c'était nos gens; j'entrai dans la première cabane, je vis de ces mauvais soldats vêtus de blanc qui n'ont point de chevaux; les bougres ne me prenaient-ils pas pour un espion ? Ils me demandèrent à quel régiment j'étais, je suis du régiment du Roz et de l'Antoine chez André de Foncine, foutre ! donnez-moi à manger. Ils m'apportèrent un gros morceau de viande sur du pain, je le pris et le mangeai; cent diables ! si jamais j'ai fait le meilleur repas. Ils donnèrent un peu de mauvaise paille à ma pauvre bête; mon Dieu ! que je men faisais mal; à la garde de Dieu, j'allai me coucher. Le lendemain matin, je tendais la tête par dessous la cabane, je regardais si je ne verrais pas quelques soldats vêtus comme moi; j'en voyais de vêtus de blanc, de rouge, de bleu; à la fin, j'en vis un vêtu comme moi, je courus à la cabane d'où il sortait; je vis le Roz et l'Antoine chez André qui commençaient à s'engargasser, ils croyaient bien tous que le diable m'avait pris. Je leur contais comment j'avais fait; ils ne me croyaient pas, nos gros maîtres y étaient. Je tirais alors mon grand couteau courbe, qui était tout couvert de sang et de chair; il y avait tout le long du fil, des brèches comme à une scie, foutre ! ils virent bien que je ne m'étais pas tenu à rien faire.

On demeura là quelques jours et on s'accorda; les uns allaient ci, les autres là; nous allâmes à Schelestadt, une jolie ville d'abord. Quand ils voulurent partir, ils dirent qu'ils donneraient un écu à celui qui se chargeait de porter deux selles de chevaux. Je dis : diable ! un écu ! C'est du bel argent. Je pris ces deux selles; je les appondis l'une à l'autre par ce qu'on met sous la queue. Je les mis sur mon épaule, je donnai mon cheval à l'un des nôtres dont le sien était boiteux. Je partis bien avant les nôtres; de rien de temps ils m'eurent devancés; je n'arrivai à l'endroit qu'on donnait à manger que bien après que les autres en étaient repartis. J'allais par des chemins du diable, de marne, de terre grasse; j'étais plus souvent par terre que levé; ah ! bougre d'écu ! jamais argent n'a été si bien gagné. Je crevais de faim. Ils me renvoyaient de Pilate à Barrabas, pour avoir un morceau de chair sur du pain. Ah ! bougre d'écu ! je fis tant que j'arrivai à la fin à Schelestadt; je trouvai de suite le Roz et l'Antoine chez l'André; ils me firent boire un verre de brandurin; un bougre qui n'y aurait pas été habitué en aurait crevé. J'allai à l'écurie; je vis mes trois chevaux l'un vers l'autre; c'était moi qui les gouvernait les trois; je couchais souvent à la crèche, j'allais toujours au fourrage pour le Roz.

Il y avait dans notre régiment un petit bougraillon de la Lorraine qui se foutait toujours de moi; il me crachait dessus, mouillait son torchon, me le jetait au nez. Le Roz s'y trouva un jour; il le mena derrière les fumiers et lui foutit un coup de son couteau courbe dans le bras, on le mena où on mène les malades. Je luis dis : ah ! bougre, tu deviendras sage. Un matin de St Croix que je pensais pas plus à lui qu'au diable, il se trouva derrière moi et recommença son train, à me cracher dessus, à me mouiller avec son torchon; le Roz s'y retrouva; il le mena derrière les fumiers et lui foutit tant de coups de son grand couteau courbe qu'il fallut le porter sur une civière où on mène les malades. Je lui dis : ah ! bougre, tu deviendras sage. Cette fois, quand il fut guéri ils le foutirent à la porte; le matin où ils le renvoyèrent, il revint derrière moi et recommença son train; ah ! le bougre, lui fis-je, je n'aurai pas besoin du Roz cette fois; je tenais ma pelle, je lui en foutis un si bon coup dans l'oreille qu'elle vola en plus de mille briques. Je l'étendis dans un fumier comme un crapaud, je luis sautais dessus, l'y roulais bien. Quand nous en partîmes, nous semblions deux diables. Les soldats s'assemblèrent, nos gros maîtres vinrent, causèrent ensemble, me donnèrent mon congé. Je le pris, et je men vins. Je n'ai pas servi en Jean foutre d'abord !


haut de page