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La Grotte de "Pierre à du Bourg"

 


L'abbé BOURGEOIS-MOINE nous explique qui était "Pierre à du Bourg" qui donna son nom à cette caverne proche de la Norbière. On retrouve la trace d'un de ses exploits, en 1773, lorsqu'il conduit à Morez, 7 louveteaux vivants qu'il avaient capturés au pied d'un sapin. Voici ce texte extrait des "Recherches sur Chapelle des Bois".

les Prés-Hauts, à Chapelle

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Cette caverne qu'on rencontre au sud-ouest du territoire dans les pâturages de Monsieur de Broissia à la Norbière est devenue surtout célèbre par le long séjour qu'y fit le nommé Pierre PAGNIER-DU-BOURG, des Prés-Hauts. Appelé en 1793 sous les drapeaux de la République lors de la réquisition des jeunes gens de 18 à 25 ans, Pierre quittait avec regret le pays natal et échangeait bien malgré lui la houlette pour le mousquet; il était peu partisan des idées nouvelles, aussi dès qu'il eut joint son régiment, il ne tarda pas à passer dans l'armée de Condé avec armes et bagages. Bientôt, l'ennui le saisit, et malgré la peine de mort qui pesait sur tout déserteur, Pierre s'enfuit et dirigea ses pas vers le cher pays qui l'avait vu naître. Deux malencontreux gendarmes le rattrapèrent et voulurent lui en interdire l'entrée. Mais Pierre n'ignorait pas la devise qui dit que "les gens de Chapelle ne savent pas reculer".

Il fallait de la force et de l'audace pour arrêter notre robuste montagnard, les deux policiers ne tardèrent pas à s'en appercevoir; après les avoir terrassés et malgré la large blessure qu'il reçut dans un bras et dont il ne guérit jamais, Pierre disparut dans les bois et put quelques jours après arriver sain et sauf dans sa famille. Mais il ne tarda pas à comprendre que cet asile n'était guère à même de lui fournir une grande sécurité; on le croyait mort, sa fiancée était mariée et elle avait trois enfants.

Il se dirigea donc vers la mystérieuse caverne à laquelle il a laissé son nom et où la police ne put jamais le découvrir. Il y vécut pendant plus de trente ans avec des faibles ressources que lui offraient les forêts qui entouraient sa sauvage retraite; il vit du gibier qu'il prend au collet et de fruits et de racines de la forêt. Après l'amnistie il récolte de la résine d'épicéa, vend de la poix et fabrique de l'amadou. Il capture et vend grives, gélinottes, lièvres, chevreuils. Son accoutrement est bizarre : coiffure faite de peau de lièvre, longue tunique taillée dans des peaux de loups, culotte de drap épais, mollets protégés par des guêtres de peaux de renards et gros souliers à clous. Il était ermite ou sauvage, mais très doux à condition qu'on ne le provoque pas. Un jour, dit Monsieur MUNIER, on le vit arriver à Morez avec cinq louveteaux vivants (1). Il ne quitta sa grotte que pour venir mourir dans une maison de Combe David le 1er janvier 1828.

Nos VIONNET, qui avaient vécu aux Prés-Hauts avant de venir à Morillon en 1907, avaient baptisé "caborne de Pierre à du Bourg" une petite grotte qui se trouvait à Côte Coulon, pâture proche de Morillon.

les Prés-Hauts

(1) Un exploit de Pierre à du Bourg

En 1773, un Pierre Alexis PAGNIER du BOURG, celui de la grotte ou peut-être un homonyme, conduisit à Morez sept louveteaux vivants dont il était parvenu à s'emparer. Voici la pétition de secours qu'à cette occasion PAGNIER adressa à l'intendant de Franche-Comté :

"Supplie humblement Pierre Alexis PAGNIER de la Chapelle des Bois, domestique chez P. Joseph GUY, fermier des MICHAUD et THOUVENEY aux Prés-Hauts, territoire de Morbier, et a l'honneur de vous présenter qu'en parcourant les bois de MOREL JEAN au territoire de ce dernier lieu pour y cueillir des morilles, il avait aperçu, sous un sapin le 31 mai 1773, une troupe de petits animaux sans savoir les distinguer et s'étant approché, il aurait reconnu que c'était des loups. Le suppliant qui n'osa les saisir seul, s'en fut prendre aide chez son maître et chez son voisin, et retournèrent ensuite dans le lieu ci-devant désigné, où ils se saisirent de ces animaux qui étaient sept et qu'il emportèrent chez eux avec beaucoup de peine à cause de la mère de leur proie qui était furieuse autour d'eux. Le dit PAGNIER s'adressa dès le lendemain aux échevins et commis de Morbier pour avoir d'eux la récompense qui leur était promise et que les ordonnances accordent à ceux qui se saisissent des animaux de cette espèce; loin qu'ils aient adhéré à la demande du suppléant, ils lui dirent qu'ils ne pouvaient le récompenser sans un ordre supérieur. En suite de quoi le dit PAGNIER fut présenter ses sept petits animaux au greffier de la justice des lieux à Morez; et après la reconnaissance faite de ces petits loups, le greffier fit au suppléant un certificat de reconnaissance de lui signé, le 3 du mois de juin.

A ce qu'il vous plaise, Monseigneur, à vue dudit certificat, ordonner aux commis de Morbier, de faire un rôle de la somme qui peut être due en suite de la capture du suppliant relativement à l'ordonnance; et à l'échevin de faire le recouvrement de pareille somme pour être ensuite remise au dit PAGNIER dans tel délai qu'il vous plaira de statuer, par une ordonnance à ce sujet et ferez justice.

P.A. PAGNIER le 20 juillet

L'intendant ordonna aux échevins de Morbier, de remettre à P.A. PAGNIER la somme de 40 Livres, celui-ci reconnaît les avoir reçues le 23 décembre 1773.


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