La guerre des pommes de terre |
Cela ne se passait pas à
Foncine le Bas. Les fonciniers n'était pas frondeurs. Mais
en général la population du jura n'était pas
disposée à laisser porter atteinte à ses intérêts
économiques. Elle avait horreur de tout ce qui choquait l'égalité.
Cet événement eut une grande répercussion dans
toute a région où il imprima des traces profondes et durables. |
Source
: Société d'émulation du Jura, "Centenaire
de la révolution de 1848"
Le 2 avril 1840 un individu de Montmorot vint au nom d'un propriétaire du château de Courlans, arrher sur la foire de Lons le Saunier, une voiture de pommes de terre à un prix élevé; ce qui fit hausser immédiatement le prix moyen de 0,20 fr par double décalitre. La foule irritée se jeta sur les sacs de pommes de terre, malgré les efforts de la police. La fureur de la multitude augmenta bien davantage lorsqu'on lui signala que deux autres voitures gagnaient Courlans par la rue des Salines. En réalité, ces voitures appartenaient à un négociant de Tournus. La foule était en train de piller ce convoi de pommes de terre quand le maire fit rentrer les deux voitures dans la cour de la vieille caserne; mais au lieu d'attendre au lendemain, ou tout au moins au soir, il manda un détachement de soldats, de gendarmes et de pompiers et fit sortir le convoi ainsi accompagné. Tout alla bien jusqu'à Montmorot; mais là, 1500 personnes se ruèrent sur le convoi, assaillirent la force armée à coups de pierres, la mirent en fuite, laissant sur place sept soldats grièvement blessés. Les trois voitures pillées, les gens de Montmorot, aidés de ceux des communes voisines, se ruèrent sur le château de Courlans qui fut mis à sac en quelques heures; tous les meubles furent jetés par les fenêtres; détruits , saccagés. Le châtelain assigna les communes de Lons, Courlans et Montmorot. Le conseil municipal de Lons, pour sa part de frais demanda que les communes de Messia, Chilly et Courlaoux soient inculpées. Cela créa un procès monstre. Le maire et le commissaire de police furent révoqués. Le jugement du tribunal de Lons, fut confirmé par la cour d'appel de Besançon qui éleva à 26 000 frs la valeur des dommages, la part de Lons passant à onze douzièmes de cette somme. La "Guerre des pommes de terre" avait éclaté au cours d'une période très calme, mais la situation économique n'était pas brillante. Deux mauvaises récoltes successives avait fait renchérir toutes les substances : le prix du pain avait doublé; une crise de misère avait sévi partout. La plupart des communes durent organiser des comités pour secourir les indigents. Il fallut faire venir du blé et des vivres et les vendre à bon marché; un peu partout on eut recours à des ateliers de charité. Dans le même temps il y eut une véritable crise d'incendie. Les gens crurent à des bandes organisées et conçurent une peur analogue, toute proportion gardée, à celle d'avant 1789. En réalité c'était le début des assurances contre le feu et des allumettes chimiques. Les gens manipulaient les allumettes que venait de découvrir à Dole le jeune Charles Sauria, sans aucune expérience. Ils prenaient d'autant moins de soin qu'ils avaient eu soin de s'assurer pour une valeur très supérieure à celle de leur maison; ces maisons faites de bois et de chaume étaient inflammables au dernier degré. Cette double crise avait aigri
les esprits et les avait disposés à mettre fin à
leur misère. |