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Nozeroy et ses environs, par Gilbert Cousin

 


Gilbert Cousin, dans sa "Description de la Franche Comté", nous décrit Nozeroy au XVIe siècle. Puis en suivant le cours de l'Ain et de la Saine qui s'y jette, arrive jusqu'à Foncine, avant de continuer sa route vers Saint-Claude et après avoir traversé le Grandvaux.

Lac de Narlay (photo Bernard Girard)

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Là, les malades frappés dans les villes voisines d’affections contractées dans une atmosphère corrompue, viennent chercher, comme dans l’asile de la salubrité, cette température douce et agréable qu’ils ne trouveraient pas ailleurs ...

Là pousse un excellent blé, le seigle, l’orge, l’avoine, la fève, le pois, la lentille, la vesce, et autres légumes.
Le pays est rempli d’arbres, pommiers, pruniers, noisetiers, poiriers, cultivés et sauvages ... Il est arrosé par trois rivières très pittoresques et poissonneuses. De tous côté on a aménagé des viviers ... A une portée de trait se meuvent sept roues de moulins qu’on a nommés moulins du saut. La quantité des ruisseaux, les sources d’eau très froide et douce, ainsi que quelques beaux étangs poissonneux nourrissent des carpes et des brochets d’une saveur exquise.
Des montagnes boisées ceignent le pays. On peut y écouter le chant varié des oiseaux. On y rencontre le cerf timide et fuyard, le lièvre, enfin toute espèce de fauves. Les bois fournissent des poutres très grosses, très fortes et d’une immense longueur. On y recueille aussi de la résine.

Au midi ... on trouve plusieurs grottes sinueuses, et c’est de l’une d’elles que s’échappe l’Ain de la manière suivante :

Quand on descend dans cette grotte, on arrive à l’entrée d’un profond précipice, au fond duquel émerge l’eau par une cavité d’une profondeur inappréciable, et large ,peut-être, d’une dizaine de pas. Cet antre est surplombé par des rochers à pic qui glacent d’épouvante ceux qui contemplent cette oeuvre grandiose.

De ce gouffre immense, l’eau s’échappe en telle abondance que, chose incroyable, la rivière pourrait tenir un vaisseau, n’étaient les rochers et les pierres au milieu desquels elle roule. J’affirme que de ce gouffre s’échappe plus d’eau que n’en verse le Lech dans le Danube ou l’Aar dans le Rhin. Chez nous on nomme cette rivière la Rivière d’Ain.

Source de l'Ain (photos Bernard Girard)

L’Ain reçoit plusieurs autres courants dont trois appartiennent à notre pays :
La Senne, gracieuse et fameuse rivière, qui prend sa source au village de Foncine, qui lui donne son nom, et qui coule dans une vallée rocheuse pour se rendre près de Bourg en passant par les Planches et Syam.

La Chaux des Crotenay, place célèbre, bâtie sur une montagne extrêmement élevée, et fortifiée tout à la fois par la nature et par les hommes. A ses côtés existe un hameau du même nom. Cette place nous a donné, issu de la grande famille des Poupet, le digne et vénérable Guillaume de Poupet, abbé de Baume, de Gouaille, et de Balerne dont la piété, la vertu et la clémence sont connues en tous pays. Et son frère Jean, chevalier illustre et commandeur de l’ordre d’Alcantera, chambellan de notre bon et doux prince, l’empereur Charles-Quint auprès duquel il fut tout puissant.

Près de la Chaux des Crotenay est Foncine, très grand village, semé de maisons de campagne, ainsi nommé parce que la rivière la Senne y prend sa source, mettant en mouvement, tout le long du village, vingt-sept roues, soit pour des meules soit pour des scies. Là se fabriquent des vases en bois propres aux usages domestiques.

Après vient le Grandvaux, semé de tant de villages qu’il y en a presque à chaque pas, et l’on voit trois lacs poissonneux dont l’un a emprunté son nom au pays lui-même; le second (et le village qui l’avoisine) a été appelé le Lac des Rouges Truites, à cause de sa grande quantité de poissons qu’il nourrit; le troisième enfin a été baptisé du nom de l’Abbaye, qui est la métropole du Grandvaux. Tout proche on aperçoit un bourg appelé le Voisinal.
On tient en grande estime les chevaux au pas d’amble de ce pays. Les chiens y sont très féroces.

Un peu au dessus de la Chaux des Crotenay se trouve le couvent des chartreux, que nous appelons Bonlieu et dont l’église paroissiale a pour curé notre Etienne Tornond.
Non loin des chartreux se voient de grands lacs, plusieurs et vastes marais, et des rivières qui abondent en poissons savoureux ... Tout près il y en a deux autres moins grands mais aussi agréables par eux-mêmes et leurs alentours. On les appelle les lacs des Maclus. Un troisième, appelé lac de Narlay, est d’une profondeur presque incroyable; son eau est limpide et nourrit plusieurs espèces de poissons. Le lac du Vernoy est le quatrième et n’est pas loin du précédent; Enfin, à l’occident, se trouvent cinq autres nappes d’eau semblables : deux portent le nom de lacs de Chambly; le troisième, celui de Fioget; le cinquième est connu sous le nom de lac de Bouchaud.

De Grandvaux on arrive après un trajet de trois heures, à Saint-Claude ... où les habitants font un négoce qui n’est pas de peu d’importance, avec le buis et d’autres racines, on y fabrique des cuillères, des flûtes, des trompettes, des chapelets, des trompes et d’autres objets qui s’exportent dans le monde entier ....


Heureux pays ! conclue notre Cousin

C’était il y a 500 ans


 

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