Lequinio à Foncine |
Notre breton vient de Siam. Il s’est dirigé vers Craon par des chemins pénibles et longs. Ce qu’il voit en arrivant, c’est le tilleul du cimetière qui absorbe le gaz azoté si nuisible et qui est le protecteur des tendres sentiments et déclarations affectueuses. Il s’étonne des costumes de ce sexe heureux, habile à dominer le nôtre, et qui sait, en tout pays, orner de fleurs le joug auquel il nous soumet : toque aplatie, broche d’argent, triple chaîne d’argent, etc ... Puis il descend vers les Planches, un des sites les plus sauvages : |
A l’entrée orientale du village, la Sene s‘abat tout à coup par une cataracte perpendiculaire de quatre vingt pieds environ; et quelques pas après, elle en éprouve une seconde également perpendiculaire et de soixante pieds à peu près; puis elle coule obscurément dans ce lit profond et taillé carrément, l’espace d’environ six cent pas avant de sortir à la plaine lumière au fond de la vallée. Les parois de ce lit profond sont coupées très parallèlement dans le rocher. Imaginez une rue étroite de Paris; donnez aux maisons à peu près le double de la hauteur qu’elles ont, et faites couler une rivière sur le pavé de cette rue. Vous aurez la Langouette. C’est ainsi qu’est nommé le cours presque souterrain de la Sene. Il n’a que douze pieds de large et son extrême profondeur le prive de la lumière à peu près comme le fond d’un puits. Les truites que la Langouette fournit sont toujours fort maigres. Une grande route vous conduit à Foncine. Du haut des rochers qui forment la côte opposée de la vallée, sur votre gauche en montant, vous entendrez et vous verrez tomber avec bruit plusieurs torrents. L’un fait une chute subite de cent cinquante pieds de hauteur. L’autre saute rapidement de marche en marche sur les rochers qu’il a taillés en degrés. A une demie-lieue des Planches le grand chemin se reploie par un angle aigu pour décrire une sinuosité qui adoucit l’ascension. Sur la droite, au premier pli de la route, vous remarquerez un hêtre qui n’a peut-être pas quarante ans et qui renferme la semence des miracles; c’est une vierge surmontée d’une croix, le tout en pierre blanche, d’un pied et demi de long. Cette statue, qui n’est pas plus grosse que le bras, fut nichée dans une entaille faite exprès dans le tronc de l’arbre, à la hauteur de l’homme. Il ne reste plus à l’écorce qu’une scissure verticale fort étroite et qui sera tout à fait close dans trois ans si l’arbre n’est point abattu. Vous allez à l’instant vous retourner à l’est et vous serez sur le haut d’un petit mont, d’où vous descendrez pour vous rendre à Foncine le bas. Aux Foncines on emploie la sciure de bois dans le ciment et on trouve qu’il la rend meilleure et la bâtisse plus solide. |